Avec Linford Christie, c’est l’un de mes héros, a-t-il affirmé peu après sa course. Le coach jamaïcain Stephen Francis avec lequel il s’était lié à ses débuts aurait pourtant souhaité qu’il s’inspire plutôt d’Ato Boldon (Trinidad) dont il lui avait longuement montré les vidéos. Mais Asafa a préféré se placer dans la lignée du Maurice Greene des Jeux de Sydney, les premiers qu’il avoue avoir vraiment suivis.
Sa conquête du record sur la piste même où Greene avait établi le sien, le 16 juin 1999 (9.79), ne tient donc probablement pas au hasard. C’est extraordinaire de battre après Maurice Greene le record du monde dans ce même stade, a-t-il déclaré. En outre, la piste déjà rapide lors de l’exploit de Greene avait été refaite à neuf dans la perspective des Jeux, dans l’espoir de voir les records tomber encore une fois à Athènes.
Je me demandais ce que cela faisait de battre un record du monde. Maintenant je le sais, c’est un sentiment extraordinaire, a-t-il expliqué. J’ai atteint mon but, soulignait-il l’air presque étonné de ce qui lui arrivait alors que les autres athlètes jamaïcains présents à Athènes célébraient son exploit en criant son nom autour de lui. Ce fils de pasteur de 22 ans estime beaucoup devoir à son père. Sa foi m’inspire beaucoup, comme le fait le reste de ma famille, explique-t-il. La première personne qu’il a donc appelée au téléphone après son record a été Nigel, l’un de ses cinq frères.
L’athlétisme est d’ailleurs une tradition chez les Powell. Un autre frère d’Asafa, Donovan, a même été demi-finaliste aux Mondiaux de Séville de 1999. Le jeune Asafa était allé le voir une fois s’entraîner au Texas et avait même appris quelques exercices avec lui. Curieusement Donovan n’avait pas su déceler l’incroyable potentiel de son frère et ne l’avait pas encouragé à faire du sprint.
L’exploit d’Athènes représente également un juste retour des choses pour Powell après sa décevante prestation aux jeux Olympiques d’août dernier. Arrivé favori après avoir été le roi des réunions en début de saison, il avait du se contenter de la cinquième place du 100 m le plus dense de l’histoire, avec cinq coureurs en moins de 9.95. L’Américain Justin Gatlin, le Portugais Francis Obikwelu, Les Américains Greene et Shawn Crawford ne lui avaient accordé qu’un strapontin.
Powell n’était pas jusqu’à ce jour l’homme des grands rendez-vous. Cinquième à Athènes, il avait également été éliminé pour faux départ en quarts de finale des championnats du monde de Paris en 2003. Son record d’Athènes le place désormais dans une autre dimension, notamment dans la perspective des championnats du monde de Helsinki. Il se dit d’ailleurs pratiquement certain de pouvoir répéter à volonté des temps sous les 9 ses 9, tout comme Maurice Greene était l’homme qui pouvait passer à volonté sous les 10 secondes. Je pense que je suis en mesure de la faire, a-t-il assuré.
Ses récents exploits dans les différentes réunions lui avaient laissé penser qu’il avait rendez-vous avec la gloire à Athènes. Je savais que je pouvais battre le record du monde et je suis très heureux que cela ait réussi, a-t-il ajouté. S’il accepte facilement de parler de ses exploits, Powell reste en revanche bien plus discret quand on lui demande de parler de l’homme à qui il a ravi le record du monde, l’Américain Tim Montgomery, empêtré dans l’affaire de dopage Balco. Je ne veux rien dire (sur lui), s’est-il borné à lancer sèchement.
Source : MAP