L’Espagne laissait jusqu’à présent fumer avec une grande permissivité. Il n’était pas rare de voir des gens avec une cigarette allumée dans une boucherie, à la banque et même dans une pharmacie. L’objectif de la loi lancée par le gouvernement socialiste, une des plus exigentes en Europe avec celles de l’Irlande, de la Norvège ou de la France, est de réduire de 5% en deux ans le taux de fumeurs en Espagne, où chaque année le tabac provoque la mort de 50.000 fumeurs et 700 fumeurs passifs. Adoptée le 15 décembre par une large majorité de députés, elle est devenue effective ce 1er janvier 2006.
L’entrée en vigueur de la loi a été précédée d’une vaste campagne publicitaire à la radio, dans les journaux et à la télévision d’un montant de quatre millions d’euros. Dès ce dimanche, les fumeurs doivent s’abstenir totalement sur leur lieu de travail, mais aussi dans des bars, restaurants et lieux de loisirs de plus de 100 m2 qui n’auraient pas de zones fumeurs. Ces zones ne peuvent pas excéder 30% de la surface du local. Les infractions à la loi seront sanctionnées par des amendes de 30 à 600.000 euros. Les établissements de moins de 100 m2 pourront choisir entre être fumeur ou non, mais ils devront en informer le client sur la porte. Les bars et restaurants de plus de 100m2 disposeront d’un délai de huit mois pour se mettre en accord avec la loi.
[b]Les réfractaires[/b]L’Espagne, second pays touristique au monde, compte 300.000 établissements hôteliers, dont 120.000 de petite taille. Beaucoup de commerçants craignent de ne pas recevoir d’autorisations des mairies pour faire les travaux. Pour d’autres, il s’agit plutôt d’une question d’esthétique. Les aéroports, hôtels, théâtres et cinémas, mais aussi les établissements psychiatriques, devront être pourvus de zones spéciales pour fumeurs.
La loi a toutefois suscité des résistances. L’écrivain Antonio Gala allumait il y a quelques jours une cigarette au milieu d’une conférence de presse en signe de protestation et affirmait : Ceux qui fument sont les survivants du CO2 des voitures, de la pollution et des exhalations des politiques. En outre, plusieurs marques à bas prix sont sorties depuis un an, certaines atteignant un euro, et ont conquis 10 à 15% de parts de marché, selon la presse espagnole. Pour la ministre de la Santé, nous nous trouvons face à une puissante industrie qui désire inoculer l’habitude de fumer au cours des jours qui restent avant l’entrée en vigueur de la loi à un plus grand nombre de jeunes.
TF1