C’est en tout cas ce qui ressort d’une déclaration d’Ahmed Taoufiq, ministre des Habous et des Affaires islamiques, à la première Chambre, mercredi dernier. Ainsi, il a précisé qu’en respect des nouveaux critères adoptés pour la construction des mosquées, les fidèles disposeront d’un lieu de culte à 300 mètres de leur résidence pour les cinq prières quotidiennes et à 600 mètres pour celle du vendredi.
Le troisième critère a trait à la densité de la population. Ainsi, la superficie des nouvelles mosquées doit être suffisamment grande pour accueillir l’ensemble des fidèles qui les fréquentent. Fini donc les garages et baraques bricolés et convertis en lieu de prière. Par ailleurs, la nouvelle disposition doit mettre un terme ou du moins juguler les effets néfastes du phénomène d’occupation de la voie publique lors de grande affluence de fidèles surtout le vendredi.
En effet, dans certains périmètres urbains, la circulation s’en trouve carrément coupée, nécessitant une mobilisation accrue des agents de la circulation et des forces de l’ordre. En fin de compte, un projet de loi, présenté en 2005, est aujourd’hui au niveau de la Chambre des conseillers. Il devra bouleverser les mécanismes de construction des lieux de culte. Mais au-delà du caractère pratique de cette réforme du champ cultuel, c’est la politique de gestion des lieux de prière qui prend un nouveau tournant.
En effet, le ministère de tutelle vise une reprise en main progressive de tout ce qui a trait aux mosquées. Après la télé et l’Internet à la mosquée, suivis de l’unification de l’appel à la prière pas encore tranchée, Ahmed Taoufiq s’attaque au gros morceau.
Le ministre a déclaré que son département exécutera un programme de construction de 82 mosquées en 2006. Un chiffre jamais réalisé auparavant puisque, jusqu’en 2004, le nombre de mosquées construites par les propres moyens du ministère ne dépassait pas 9 par an. Il est toutefois passé à 30 en 2005 mais sans pour autant rivaliser avec les bienfaiteurs qui détiennent toujours le score des réalisations, passées de 74 nouvelles mosquées en 2004 à 161 en 2005.
Pour rester dans le langage des chiffres, notons que le volume d’investissement pour la construction et la réfection des mosquées au titre de cette année est de 165 millions de DH. Sans commune mesure avec les 40 millions de DH par an dépensés par le ministère avant 2004 ou même les 113 millions concédés en 2005. Rappelons à ce sujet qu’au lendemain des attentats du 16 mai, les Habous se sont engagés dans une politique ambitieuse pour couper l’herbe sous le pied de ceux voulant utiliser les lieux de culte à des fins obscurantistes.
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Les bienfaiteurs contrôlés
Les résultats d’un recensement, effectué il y a deux ans par le ministère des Habous et des Affaires islamiques, font état de l’existence au Maroc de 32.000 mosquées et 1.500 salles de prière.
Depuis 2003, le souci du département d’Ahmed Taoufiq est de contrôler ce vaste champ qui a longtemps souffert d’anarchie. Il a donc commencé par décréter une nouvelle organisation de l’action des bienfaiteurs.
Ces derniers sont, depuis, obligés d’agir dans le cadre d’associations dont l’ordonnateur est le gouverneur ou le wali. Selon Mohamed Darif, politologue, la réforme du champ religieux a commencé en 1999, lors de la grande politique de rénovation des politiques publiques. Selon lui, les événements du 16 mai n’ont fait qu’accélérer cette tendance.
Mostafa Bentak
LE MATIN