Hafida est née un jour de 1970 dans un douar situé pas loin de la ville de Berrechid. Au milieu des années 80, elle est arrivée à Berrechid, en compagnie de ses parents et de sa sœur aînée, Zahra. Entre-temps, leur mère a rendu l’âme et leur père s’est remarié. Ce dernier qui se chargeait d’elles leur a tourné le dos pour se préoccuper uniquement de sa nouvelle femme. En conséquence, elles étaient obligées de chercher à gagner leur vie. Heureusement, elles ont été facilement embauchées dans une société. Hafida et Zahra passaient leur journée au travail. Elles ne retournaient chez elles que tardivement le soir. Au fil du temps, Zahra a fait la connaissance d’un jeune homme. Une connaissance qui a cédé la place à une histoire d’amour qui a abouti au mariage. Enfin, les deux sœurs ont eu un homme qui peut les soutenir. Leur père semble les avoir oubliées puisqu’il ne demandait même pas de leurs nouvelles au moins une fois par mois. Au fil du temps, le foyer de Zahra a été égayé d’un garçon, puis d’une fille. Une belle fille qui a été considérée comme la lueur qui est venue éclairer l’avenir de la famille. Le mari de Zakia a émigré clandestinement vers l’Europe. Le premier mois est passé, puis le deuxième, le troisième et enfin le énième mais sans nouvelle. Où se trouvait-il ? Quelques voisins du douar l’ont croisé en Espagne. Ce qui prouvait qu’il était encore en vie. Mais il semble qu’il a décidé de ne plus retourner chez lui au Maroc. Depuis, Zahra et sa sœur, Hafida, se sont engagées à se charger des deux enfants. Elles déployaient tous leurs efforts pour être à la hauteur de leur responsabilité envers elles-mêmes et envers les deux enfants. Seulement, elles ont été licenciées enfin par leur patron. Pourquoi? Pas de réponse. Les deux sœurs étaient obligées de chercher à gauche et à droite pour gagner leur vie et subvenir aux besoins des deux enfants. Elles ont frappé à plusieurs portes. En vain.
Elles n’ont plus d’argent. La solution ? La prostitution. Hafida et Zahra sont devenues deux filles de joie. À chaque après-midi, elles sortaient en quête d’un client afin de partager avec lui un petit moment sur le même lit contre une somme allant de soixante-dix à cent dirhams.
La dernière fois, Zahra a conduit, l’après-midi, ses deux enfants à l’école, alors que sa sœur, Hafida est sortie chercher un client. Pas moins de quelques minutes, cette dernière a conduit un jeune homme chez elle. À mi-chemin, elle a appris qu’il dispose de plus de dix mille dirhams en poche. C’est une fortune pour elle. Et elle a pensé ne pas rater l’occasion. Comment? Quand elle a enlevé sa culotte et s’est allongée sur le lit, son client a déboutonné son pantalon et s’est apprêté de s’allonger près d’elle. Et tout d’un coup, elle a fait sortir un couteau qui était sous l’oreiller. Elle l’a poignardé à trois reprises. Le client n’a lancé qu’un seul cri strident pour rendre l’âme. Hafida a fouillé les poches de sa veste et de son pantalon, a mis la main sur la somme d’argent et est restée dans l’attente de sa sœur. Quand cette dernière est arrivée, elle n’a pas su quoi faire. Toutes les deux ont fini par laver aussitôt les lieux pour ne pas laisser de trace de sang, ont mis le cadavre dans une chambre qu’elles ont verrouillée loin des yeux des enfants. Elles pensaient découper le cadavre en morceaux pour les éparpiller dans des terrains vagues. Mais, elles n’ont pas pu le faire. Raison pour laquelle elles ont fini par se présenter de leur plein gré devant la police.
Quelle est donc la vérité ? Le client avait-il vraiment l’intention de tuer Hafida ? Le représentant du procureur du Roi a affirmé que la police n’a pas trouvé une autre arme blanche que celle avec laquelle elle a tué son client. Ce qui prouve, selon le représentant du ministère public, que la mise en cause ment. Et l’argent qu’elle a dérobé? La police ne l’a pas également découvert dans la chambre. Le mystère plane sur cette affaire qui a été jugée par la Cour en condamnant Hafida à 20 ans de réclusion criminelle et Zahra, qui était accusée de non-dénonciation, à deux mois de prison avec sursis.
Abderrafii ALOUMLIKI
Aujourdhui.ma