Un Français assassiné à El Jadida

Nous sommes jeudi 28 septembre. Bernard arrive à El Jadida en compagnie de trois amis français. Ses trois amis vont s’installer à l’hôtel tandis que lui regagne son appartement. Ils ont convenu de se retrouver plus tard. Mais Bernard ne leur donne plus signe de vie n’envoie ni appel au téléphone, ni sms. Ses trois amis se rendent donc chez lui, mercredi 4 octobre, pour lui rendre visite et surtout, se rassurer à son sujet. Personne ne leur ouvre la porte. Que faire ? se demandent ses amis, sérieusement inquiets. S’en aller comme si de rien n’était ? Attendre encore qu’il se décide à réapparaître ? Leur décision est vite prise : la situation est inquiétante, il faut alerter la police.

Des inspecteurs de la police judiciaire d’El Jadida se dépêchent sur les lieux. La porte est fermée. Les instructions du Parquet général de la ville sont claires : au besoin, ils sont habilités à défoncer la porte. C’est chose faite.

C’est alors qu’une odeur nauséabonde s’exhale de l’appartement. Une odeur de mort, en fait. Pendant ce temps, attirés par l’intervention des policiers, les voisins se sont rassemblés à l’extérieur de la résidence. Chacun y va de son hypothèse. Tout le monde attend de savoir ce que les policiers ont bien pu découvrir même si chacun s’en doute un peu…À l’intérieur de l’appartement, les enquêteurs découvre le corps de Bernard sans vie, à moitié nu, les mains ligotées par un fil électrique. Aucune trace de blessures, ni de sang n’est constatée sur le corps de la victime. Il n’a pas été, de toute évidence, poignardé. Les enquêteurs penchent pour un empoisonnement ou une strangulation. Le résultat de l’autopsie confirme la seconde hypothèse. Le crime remonte à deux jours.

L’enquête s’avère difficile. Quel est le profil du meurtrier ? Quel est son mobile ?

En l’absence d’indices probants, les enquêteurs partent sur la base de deux éléments : l’homosexualité et le vol. Bernard a été découvert à moitié nu, de nombreux éléments matériels trahissent son penchant sexuel contre-nature et un préservatif trouvé près du cadavre confirme l’hypothèse des policiers. Ces derniers remarquent également la disparition de son téléphone portable et de son appareil photo numérique, dont l’étui a été négligé par le meurtrier. Autre élément significatif, il ne trouve pas la moindre somme d’argent sur l’homme ni dans ses bagages.

L’enquête de terrain est déclenchée. Les policiers se lancent à la recherche de toutes les personnes qui rendaient visite à Bernard. L’interrogatoire de la propriétaire de l’appartement leur fournit le signalement d’un jeune homme, gardien de voitures stationnées devant le quartier portugais d’El Jadida, qui fréquentait la victime. Ce dernier semble n’avoir plus donné signe de vie depuis la disparition de Bernard. Serait-ce donc lui, le meurtrier ?

Des informations révèlent aux enquêteurs que le suspect a quitté El Jadida pour se rendre chez des proches résidant à Casablanca. Une fois à Casablanca, de nouvelles informations dirigent les enquêteurs vers Settat. Le gardien de voitures est natif de la région d’Ouled Saïd, où sa famille y vit encore. Là, les enquêteurs apprennent qu’en effet, le suspect y est arrivé à bord d’un grand taxi, a passé seulement la nuit et en est reparti le lendemain après avoir changé des euros pour un montant de 4500 dirhams. Sa destination ? Les enquêteurs de la PJ d’El Jadida sont arrivés à savoir qu’il s’est rendu à Ouled Taïma, province de Taroudant. En collaboration avec leurs collègues de la PJ d’Agadir, ils parviennent à mettre la main sur le gardien, Saïd, sur son ami Âdel et sur une fille qui les accompagnait.

Saïd n’était pas seul lors du meurtre de Bernard. Il était en compagnie de son ami, Âdel. Tous deux avaient prévu de coucher avec Bernard en échange d’une grasse rétribution. Mais l’homme ne leur a accordé finalement que très peu d’argent.

Du coup, les deux prostitués se sont mis en colère. Jusqu’à décider de se payer eux-mêmes : ils ont donc ligoté les mains de leur victime avant de l’étrangler puis de faire main basse sur tout ce que contenait l’appartement d’objets de valeur et d’argent liquide. Puis de prendre la fuite.

Les deux jeunes tueurs et la jeune fille ont été traduits devant la Cour d’appel d’El Jadida. L’homosexualité vénale ne paie pas tant que ça et le crime encore moins. Les trois malfaiteurs auront tout le loisir de s’en convaincre derrière les barreaux de leur prison…

Abderrafii ALOUMLIKI

Aujourdhui.ma

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