Dans ce quartier, où s’approvisionne la plupart des commerces du Royaume, la culture du Business dans son acception chinoise sert désormais de devise courante pour les négociants, qu’ils soient détaillants ou grossistes, provenant de toutes les régions du Royaume.
Mais, le débarquement massif des grossistes chinois à Derb Omar inquiète, dans leur traditionnelle chasse gardée, les commerçants fassis et amazigh qui étaient maîtres de la situation jusqu’à un passé proche.
Transitant par la place de la victoire, la porte nord-ouest de Derb Omar, le visiteur se retrouve dans la ruelle Mohamed Lakriek, devenue fief des commerçants des produits chinois, qui s’est progressivement transformée en un centre spécialisé dans le négoce de gros, fort d’une quarantaine de grossistes y compris un grand nombre de Chinois.
L’offre qui prolifère de produits chinois frappe par sa diversité et ses prix largement abordables, mais surtout par un strict sens d’organisation que font transparaître des articles soigneusement étalés pour une clientèle diversifiée venue des différentes régions du Royaume.
Pour faire de bonnes affaires, les visiteurs ne se contentent plus de l’amazigh ou de l’accent Fassi. Ils s’ingénient désormais à faire usage d’expressions chinoises, confie à Hassan. M gérant d’une boutique appartenant à un grossiste chinois.
La situation qui prévaut actuellement, avec en toile de fond des arrivages de marchandises made in China en tout genre et à bas prix, en dit long sur le début de l’enracinement de la culture chinoise à Derb Omar.
Le propriétaire de la boutique Lee force l’admiration par son dévouement dans le travail, au point de participer aux taches habituellement exécutées par ses employés tels les travaux ménagers et l’entretien constant du magasin, a-t-il fait observer.
Se disant chanceux de travailler avec les Chinois, il indique avoir appris à perfectionner le métier de commerce grâce à son patron. Ces génies chinois s’imposent maintenant en maîtres du jeu sur le marché, tant ils proposent des prix imbattables, déplore Lahcen, un commerçant de la rue de Strasbourg, l’une des principales artères de Derb Omar.
Je n’arrive plus à comprendre la raison de cette grande différence dans les prix, alors qu’on s’approvisionne chez les mêmes fournisseurs que les Chinois, s’indigne-t-il, notant que le long de la journée, il n’est parvenu à vendre que trois trottinettes à 42 dirhams chacune, alors que deux ans auparavant il les a vendus à 400 dhs la pièce.
Le flot des marchandises chinoises qui s’abat sur le premier marché de gros au Maroc n’a pas fait que des perdants. Il paraît paradoxalement que certains commerçants ont bel et bien profité de la situation, ce qui s’est traduit par la floraison de certaines activités telles la location de commerce.
Après 30 ans de métier, Haj Ahmed a choisi de louer sa boutique de 30 m2 à un commerçant chinois moyennant une somme mensuelle de 10.000 DH. C’est l’équivalent de ce que j’ai gagné auparavant, a-t-il confié. Pour Haj Ahmed, il est inutile d’entrer en concurrence avec ces diables de commerçants chinois. Plus qu’un constat de portée individuelle, l’attitude de Haj Ahmed traduit de fait un profond bouleversement de plus en plus ressenti sur un pan entier de l’économie, comme en témoigne l’engouement manifeste des commerçants, mais aussi des propriétaires immobiliers de proximité, pour offrir en location leurs magasins à ces génies chinois connus, du reste, pour être des locataires solvables et sérieux.
source:lopinion