L’Algérie connaît, depuis quelques semaines, un véritable soulèvement ethnique des populations Touaregs dans le grand Sahara central que les forces de sécurité algériennes ont mis en état d’alerte maximal. Les derniers évènements en date ont eu lieu, en début de semaine, dans la ville de Tamanrasset, à 2.000 km au sud de la capitale algérienne. Tamanrasset étant, rappelons-le, l’une des plus importantes cités des Touaregs. Des dizaines de jeunes et de moins jeunes, issus des tribus Targuis, populations entièrement berbérophones, ont littéralement saccagé tous les symboles de l’Etat algérien qu’ils considèrent comme un oppresseur qui a procédé à l’arrestation de plusieurs dizaines de manifestants.
Le siège de l’Assemblée populaire de wilaya (APW) a été pris d’assaut par les foules en colère, avant d’être carrément incendié. Le même sort a été réservé à d’autres administrations comme les sièges des directions des moudjahidine, de la jeunesse et des sports, du commerce et du transport. Les drapeaux algériens ont également été systématiquement arrachés et brûlés. Estimant que les autorités algériennes ont pillé les richesses naturelles des Touaregs (toute la réserve algérienne en pétrole et en gaz naturel est située dans le territoire des Touaregs), les manifestants se sont également attaqués au siège de la Sonarem (direction des mines) et le bureau de la main-d’œuvre.
Un véhicule de l’ENOR (société chargée des mines d’or du Hoggar) a été brûlé et un autre subtilisé, reconnaissent les autorités algériennes locales. Le matériel de la direction de la réglementation et de l’administration générale (DRAG) a lui-aussi été saccagé. En somme, toute la région a sombré dans un chaos total. La circulation est interrompue et le calme n’a pas encore été établi.Cette Intifada fait suite à d’autres soulèvements survenus à Djanet (une autre ville importante des tribus Touaregs) à la fin du mois de juin dernier. A noter que les populations Touaregs sont situées essentiellement en Algérie, au Mali et au Niger. Mais ces tribus amazighes sont également installées en Libye et dans une moindre mesure au Tchad, au Burkina Faso et même au Benin. Ces peuples fiers de nomades, les Touaregs se montrèrent au fil des siècles rebelles à tout mélange avec les ethnies qui les entourent. Ils sont ainsi les seuls Amazighs qui ont perduré l’usage du Tifinagh. Aujourd’hui, ils exigent un statut d’autonomie, voire une indépendance. Le gouvernement algérien a toujours considéré les revendications des Touaregs comme un danger pour la stabilité du pays. C’est pour cette raison qu’Alger a activement milité pour éteindre l’insurrection armée des Touaregs au Niger, qui s’est soldée par la conclusion d’un accord de paix signé d’ailleurs à Tamanrasset en 1997.
Toutefois, le bras armé et militant des Touaregs, le Mouvement Populaire de l’Azawad (MPA), reste toujours très actifs. Les émeutes de Tamanrasset le prouvent. Le contexte politique international et la prolifération du trafic d’armes et du terrorisme dans la région du Sahara central semblent être des facteurs favorables pour la cause Targuie. Alors que le MPA avait opté pour une indépendance d’abord, au Niger et au Mali, avant de s’attaquer à l’Algérie et la Libye, les Touaregs semblent avoir changé de tactique.
La fragilité diplomatique de l’Algérie et de la Libye leur permet aujourd’hui de revendiquer des richesses dont les Touaregs ne profitent absolument pas : le pétrole et le gaz naturel. Estimés à environs trois millions, les Touaregs refusent en général ce terme d’origine arabe et généralisé par les Français pour les désigner. Ils préfèrent utiliser le nom de Kel Tamacheq (ceux qui parlent le tamacheq, une langue du groupe berbère) ou de Kel Taggelmoust (ceux qui portent le chèche indigo), ou le nom des grandes confédérations qu’ils constituent.Ces confédérations sont en fait de véritables sultanats, avec leurs chefs et leur organisation tribale ancestrale. Ces sultanats sont au nombre de sept : Houggar, Azguer, Ayer, Igar Ntikrit, Limden, Ikress et Tamzguida.
source:aujourdhui