Pour lui, pour que les notions du code de la famille soient assimilées par tous, il faudra être patients. «Les comportements et les traditions non désirés au niveau des nouvelles dispositions ne peuvent être bannis que progressivement. Les juges sont devenus plus sévères dans l’octroi de la permission des mariages des mineures.
A titre d’exemple, sur129 demandes à Beni Mellal, 67 ont été refusées», se félicite le ministre de la Justice.
Il faut reconnaître que le phénomène commence de plus en plus à perdre de son ampleur. Mais la pratique du mariage précoce demeure encore existante à cause de l’analphabétisme et de la pauvreté.
Dans bon nombre de campagnes ainsi que dans les quartiers les plus démunis, le mariage des mineures est monnaie-courante. Nombreux sont les parents qui préfèrent encore marier leurs filles avant l’âge de dix-huit ans. Traditions et mentalités obligent ! On pense que le mariage est la meilleure destinée de la fille.
Ainsi, 12 % des filles âgées entre 15-19 ans ont le statut d’épouse au Maroc.
Les associations notamment celles qui défendent les droits des femmes critiquent l’exception permise par le code de la famille concernant le mariage des mineures. Les militantes ne comprennent pas sur quelles bases les juges accordent leurs autorisations.
La sensibilisation reste, aujourd’hui, de mise. La moudawana est claire : «l’aptitude au mariage s’acquiert pour l’homme et pour la femme jouissant de leurs facultés mentales, à 18 ans grégoriens révolus». L’homme et la femme sont placés sur un pied d’égalité selon la loi. Or, la pratique est autre. Bon nombre de parents profitent de l’exception quoique la procédure n’est pas simple.
Les mariages précoces sont, en effet, soumis à une autorisation préalable du juge. La demande comporte l’intérêt et les raisons des concernés. Le juge doit entendre le père et la mère de la mineure pour qu’il s’assure que le mariage précoce ne représentera pas un danger pour la santé et la psychologie de la fille. D’où l’importance d’une expertise médicale et d’une enquête sociale.
Le mariage de la mineure est soumis aussi à l’accord du tuteur légal. Toute fraude est punie pénalement à la demande de la personne lésée.
Celle-ci peut même demander la nullité du mariage et le paiement des dommages-intérêts. En dépit du mariage, la femme mineure reste sous tutelle de son tuteur légal.
La loi est transparente. Encore faut-il la respecter pour protéger les intérêts de toutes les parties. Le mariage des mineures doit être bannie totalement. Bon nombre de militants associatifs le considèrent comme une «pédophilie autorisée et masquée».
Avant l’âge de 18 ans, la place d’une fille est au sein de l’école. Une adolescente de 15 ou 16 ans ne peut pas assumer une responsabilité si lourde comme le mariage. Maintes interrogations se posent avec insistance : Saura-t-elle gérer sa maison comme une femme plus âgée qu’elle ? Comment le mariage se répercutera-il sur sa santé physique et mentale ? Les parents sont priés de réfléchir minutieusement aux réponses.
Le mariage ne doit plus être considéré comme le seul avenir des filles. Certes, les choses commencent à changer. Mais, il reste encore un long chemin à parcourir.
Jihane Gattioui
LE MATIN