Au pire, cela donne naissance à des affaires criminelles, telle celle où s’est impliqué un pauvre type, que l’on dénommera Yazid.
Yazid est donc un bon gars, qui n’a rien d’un mari volage, mais plutôt père de famille modèle, papa poule même pour certains, réputé pour son respect de ses voisins, toujours disponible pour prêter main forte quand on en a besoin. Il va cependant assister à sa vie paisible basculer en moins de temps qu’il n’en faut pour s’en rendre compte. Pour avoir tué sa femme, il s’en tirera quand même avec10 années de réclusion, après sa dernière apparition devant ses juges, au niveau de la Chambre criminelle près la Cour d’appel de Casablanca.
Bizarrement, une autre particularité propre à toutes sortes d’affaires d’adultère, c’est que la personne trompée, que ce soit la femme ou l’homme, est toujours la dernière à en prendre connaissance. C’est notamment le cas de Yazid, qui sera informé par l’un de ses voisins du comportement reprochable de sa femme. Ainsi, celle-ci le tromperait. Et au sein du domicile conjugal même. Tous les ingrédients pour «produire» un homme prêt à tout étaient réunis. Surtout cette dernière réflexion mentionnée par le voisin : «Voyons ! Mais tout le monde est au courant de cette histoire, tu es le seul à ne rien savoir…». L’amant présumé serait un jeune habitant le même quartier.
Le fait d’avoir été informé de cette histoire causa un profond préjudice moral chez Yazid. Lui qui était un mari modèle, fidèle, attentionné et tout le baratin, n’ayant qu’un souci dans la vie, garantir une existence et un avenir décents à ses deux enfants.
Du coup, en dépit de toute sa volonté d’infirmer ce qu’il avait entendu, la question continua de lui tarauder l’esprit. Il finit par être rongé par le doute, au point de chambouler, volontairement, toutes ses habitudes, ses horaires, ses entrées et sorties à la maison, etc. Un autre exercice auquel il s’adonnait consistait à se tapir dans un recoin, de façon à épier de loin son foyer, en quête d’un éventuel intrus, source de son profond désarroi. Dans la vie de tous les jours, on qualifie ce comportement de paranoïa. La justice, elle, parle de guet-apens et de préméditation.
Un beau jour… ou plutôt un mauvais jour, la partie de chasse à l’intrus de Yazid allait cesser d’être infructueuse. En effet, à sa grande surprise, il aperçut un gaillard marcher le plus tranquillement du monde en direction de sa demeure. Il atteint celle-ci, frappe à la porte et s’invite à l’intérieur.
Yazid sentit la température monter dans son corps, son rythme cardiaque doubla de cadence, son sang était en ébullition, ses mains tremblaient, il tenait difficilement sur ses jambes… Quelques minutes plus tard, il emboîta le pas à l’invité indésirable. Armé d’un gros bâton, il fit irruption dans la maison. Sa femme sursauta et vint à sa rencontre. Elle était pâle, les yeux en dehors des orbites. Il l’écarta calmement, se dirigea vers la chambre à coucher et là, un jeune bien connu dans le quartier prenait ses aises.
L’intrus sursauta à son tour, il recevra le premier coup de Yazid, avant que celui-ci se tourne vers sa femme. Hors de lui, il se déchaîna avec beaucoup de violence sur elle, lui donnant la mort instantanément.
Poursuivi pour homicide volontaire avec préméditation et guet-apens, il aura à croupir 10 années en prison, tandis que ses enfants seront privés de leurs deux parents. Une affaire où tout le monde est perdant, à cause de deux actes irréfléchis. Le premier venant de la femme à cause de son infidélité, le second étant l’œuvre de Yazid, qui ne voyait en la chose qu’une question d’honneur, alors que d’autres issues pouvaient être envisagées.
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Ce que dit la loi
Article 393
Le meurtre commis avec préméditation ou guet-apens est qualifié d’assassinat et puni de la peine de mort.
Article 394
La préméditation consiste dans le dessein, formé avant l’action, d’attenter à la personne d’un individu déterminé, ou même de celui qui sera trouvé ou rencontré, quand même ce dessein dépendrait de quelque circonstance ou de quelque condition.
Article 395
Le guet-apens consiste à attendre plus ou moins de temps, dans un ou divers lieux, un individu, soit pour lui donner la mort, soit pour exercer sur lui des actes de violence.
Article 418 (Evoqué par la défense)
Le meurtre, les blessures et les coups sont excusables s’ils sont commis par l’un des époux sur la personne de l’autre ainsi que sur le complice à l’instant où il les surprend en flagrant délit d’adultère.
Abdelhakim Hamdane
LE MATIN