Certes, fait-on prévaloir, l’actuelle saison serait inférieure à la moyenne, mais tout porte à croire qu’elle le serait au sens large et non au sens strict. L’actuelle campagne agricole serait certainement marquée par un déficit pluviométrique susceptible de dépasser le cap des 30 % par rapport à une année normale.
Et au point où sont allées les choses, la production céréalière au titre de cette campagne frôlerait, dans le meilleur des cas, à peine les 60 millions de quintaux. Son effet modéré serait, toutefois, quelque peu compensé par la poursuite du développement du secteur de la pêche et l’extension relativement rapide des autres cultures.
En tout cas, en rupture avec 2006, le secteur primaire, qui a bénéficié d’une conjoncture relativement favorable caractérisée au plan national par une excellente campagne agricole et au niveau international par une demande mondiale soutenue, enregistrerait une baisse de sa valeur ajoutée de 6,8% en 2007.
Cette évolution est d’autant plus palpable qu’au 5 janvier dernier, on a enregistré un net recul des superficies cultivées en particulier pour les céréales d’automne, estimé à 4 millions d’hectares pour les trois principaux types de céréales (blé dur, blé tendre et orge), soit une réduction de 15 % par rapport à la moyenne enregistrée durant la même période sur les cinq dernières années.
Le développement tardif de ces cultures par les conditions climatiques consiste en la baisse des températures, avec une détérioration de la situation végétale de ces mêmes cultures dans certaines régions agricoles, notamment El Haouz, le Plateau des phosphates, l’Oriental et le Moyen et le Grand Atlas.
Pour ce qui est du remplissage des barrages agricoles, le taux a atteint 54% pour des stocks de l’ordre de 7,3 milliards de m3, contre 40% durant la même période de l’année précédente. Ceci dit, les conditions climatiques ayant prévalu en 2006 ont permis un bon développement des pâturages et la création de conditions plus propices pour l’investissement en élevage. Cette situation serait à l’origine d’une participation appréciable à la formation de la valeur ajoutée agricole en 2007.
De fait, récurrente à plus d’un titre et de plus en plus structurelle, la sécheresse doit, par les temps qui courent, faire l’objet d’un nouveau mode de gestion. C’est dire toute l’importance que revêt la mise en place d’actions à même de reconvertir l’agriculture vivrière marocaine, tributaire de la céréaliculture, par des spéculations agricoles plus résistantes à la sécheresse et qui présentent des avantages compétitifs.
Il s’agit principalement du développement de l’arboriculture (olivier, amandier, palmier dattier et figuier), des arbustes fourragers, des légumineuses et de l’élevage ovin et caprin. Ce programme devrait être étayé par une contribution de l’Etat pour constituer le fonds dédié à l’indemnisation des agriculteurs.
Concernant les autres filières agricoles modernes, les pouvoirs publics privilégient l’approche de l’accompagnement basée sur la contractualisation. Une démarche qui gagnerait, à coup sûr, à être relayée par la mise en place d’une batterie d’actions complémentaires visant l’encouragement à la modernisation du secteur agricole. Le punch devrait aussi être donné au processus d’ajustement de l’irrigation. On sait qu’à ce niveau, les pouvoirs publics, pour améliorer la rentabilité des infrastructures de mobilisation de l’eau, privilégient une stratégie visant l’extension des superficies irriguées à un rythme de 10.000 hectares par an.
Objectif clairement affiché : procéder à l’équipement de près de 120.000 ha de terres dominées par des barrages, mais non irriguées.
On juge aussi incontournable de mettre en branle, et avec célérité, les autres actions concernant notamment la réhabilitation des infrastructures d’irrigation déjà existantes, à raison de 10.000 ha par an et l’extension des terres arables à travers l’épierrage de 60.000 ha sur trois ans, à raison de 20.000 ha par an.
Il va sans dire que l’octroi de l’Etat de subventions, de baisse des taux d’intérêt appliqués pour les crédits équipements et campagnes agricoles et la reconduction du programme anti-sécheresse prévoyant l’assurance d’au moins 300.000 ha, sont autant d’actions qu’il faut rééditer. Somme toute, des mesures d’autant plus nécessaires qu’elles permettraient de limiter les effets pernicieux du phénomène de ressac.
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Evolution contrastée en 2006
Ayant bénéficié d’une excellente campagne céréalière (89 millions de quintaux), le secteur primaire avait réalisé un taux de croissance de 31,3% après une baisse de 18,2% à fin juin 2005. Pour le deuxième semestre, les estimationstablent sur une croissance de 30% par rapport à la même période de l’année précédente, les effets positifs de la campagne agricole 2005-2006 continuant de se distiller notamment sur l’activité de l’élevage qui va, de surcroît, bénéficier des mesures mises en place par les pouvoirs publics (programmes de vaccination, encadrement sanitaire du cheptel).
Cependant, les activités agricoles hors céréaliculture et élevage avaient fait face à d’importantes difficultés de commercialisation sur les marchés traditionnels d’exportation, en liaison avec l’émergence de nouveaux concurrents comme l’Egypte et la Turquie.
Abdelali Boukhalef
LE MATIN