En annonçant une prise de participation de 35% dans le capital de Bank of Africa, le président de BMCE Bank, Othman Benjelloun, a créeé de nouveau la surprise, prenant ainsi de court la salle du forum du dixième étage du siège de la banque, transformé pour la circonstance en un conclave où les présidents et directeurs généraux des deux groupes, la presse nationale et internationale, avaient été conviés, moment privilégié, à l’annonce solennelle de l’événement.
Moment historique, étape décisive du développement pour deux groupes bancaires qui confirment par une démarche croisée leur implantation dans un continent africain aujourd’hui courtisé plus que jamais par les Américains, les Chinois, les Européens, voire les voisins algériens.
L’Afrique, comme le soulignera Othman Benjelloun, incarne à présent le «cristallisateur» des ambitions planétaires et pas seulement en termes de marchés , des richesses à n’en plus finir, une population de près de 1 milliard d’habitants qui, dans moins de cinquante ans sera de 2 milliards – chiffre de la Chine aujourd’hui – et promet un avenir à l’humanité. C’est une profession de foi que cette signature de partenariat illustrée par l’acquisition par BMCE Bank de 35% de Bank of Africa.
Celle-ci, pour sacrifier au mythe des chiffres, représente quelque 15 pays du continent, plus Madagascar, des centaines de filiales, des milliers de collaborateurs, des sociétés de crédit-bail, d’assurance-vie, des sociétés d’investissement, une société de bourse, un siège à Paris et la fameuse African Financial Holding qui assure une expansion multi-métiers dont l’Afrique mesure la portée. Bank of Africa a même créé une banque de l’habitat.
Créée en 1982 à Bamako, la Bank of Africa a suivi un rythme de croissance exponentielle à tous les plans.
Et surtout une implantation géographique qui, déclinée sur la carte continentale lors de la signature, donne la mesure réelle d’un véritable enjeu économique et financier à l’échelle de l’Afrique toute entière. Aujourd’hui, son bilan chiffré s’élève à plus de 1,6 milliard d’euros et un bénéfice net de quelque 20 millions d’euros. Un même objectif réunit ainsi, officiellement, deux groupes bancaires à vocation continentale et internationale : le développement de l’Afrique.
Une même stratégie aussi : l’activité de banque commerciale, l’activité de banque d’affaires ou d’investissements.
Une même vision enfin : anticiper sur les événements et devancer l’horloge en conjuguant les efforts des uns et des autres.
Aujourd’hui , la complémentarité est d’autant plus affirmée que, pour sa part, BMCE Bank peut se prévaloir à juste titre d’une présence et d’une implantation proactive depuis des années : au même Mali déjà il y a plusieurs années lorsqu’il a fallu mettre à niveau la Banque d’Etat, au Congo avec la Congolaise des banques, au Sénégal, au Gabon, en Tunisie et bientôt en Algérie.
Progressive, mise en œuvre crescendo, une telle montée en puissance doit beaucoup au président Othman Benjelloun qui cultive une vision à long terme et ne se départit pas de sa vision intercontinentale. Comme pour l’Asie ou l’Europe, il procède du même impératif patriotique : implanter son groupe, c’est implanter l’image du Maroc !
Il s’est fait fort de la souligner, vendredi dernier, lors de la signature de la convention de partenariat : «En écrivant cette page nouvelle de son histoire, a-t-il dit, nous nous remémorons que BMCE Bank, qu’elle ait été publique ou privée, a toujours servi les intérêts ultimes de l’économie marocaine, se mettant au service des acteurs les plus cruciaux qui ont fait le Maroc économique d’aujourd’hui et qui continuent de la bâtir. Nous nous remémorons que BMCE Bank a été le visage financier extérieur du Maroc dont le crédit financier était intimement lié à celui dont jouissait notre banque sur les marchés internationaux».
Cette conviction chevillée au corps, rappelée de manière régulière, fera dire encore à Othman Benjelloun que l’initiative de partenariat avec Bank of Africa, «participe de la dynamique impulsée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, notamment à travers la politique extérieure nationale, qui vise le resserrement des relations économiques, humaines et culturelles avec le continent africain, notamment avec les pays qui possèdent avec le Maroc un héritage historique de spiritualité et d’échanges».
Et dans l’envolée où un hommage appuyé à été rendu au président fondateur de BMCE, Magid Benjelloun, décédé une semaine jour pour jour, le président Othman Benjelloun a affirmé que hommes et femmes de ce nouveau partenariat «œuvreront chacun dans son pays et domaine d’activité à l’édification économique d’une Afrique ouverte et métissée, solidaire et rassemblée». Et de conclure son allocution en exprimant un vœu qu’il entend partager : «Mon ambition et mon rêve, en tant qu’Africain, est de réaliser la présence de BMCE Bank – Bank Of Africa dans la totalité des nations de notre belle Afrique, du nord au sud, de l’est à l’ouest afin d’aider au développement et à l’épanouissement de près de 1 milliard de citoyens de notre cher continent».
Avec une verve aussi tonifiante, le président du groupe Bank of Africa, Paul Derreumaux, s’est fendu d’un discours où la tonalité poétique ne le cède en rien à la rigueur intellectuelle. Un véritable exposé décrivant la rencontre de deux hommes et de deux idéaux, deux rêves en somme appuyés sur une même préoccupation: le développement et la modernisation du continent. «La force des personnages, l’approche propre à chacun ensuite, enfin la mise en œuvre du scénario». Découpé en trois paliers, le processus de «fusion» scellé sous forme d’un mariage pionnier et unique en son genre rappelle comment de premiers contacts à des consultations avancées, enfin à la signature de la convention – dont le communiqué officiel sera rendu public ce mardi 20 mars comme l’exige le CDVM -, le partenariat a été finalisé.
«C’est, dit-il, l’histoire d’une décision courageuse, celle que deux personnages ont prise ensemble, après mûre réflexion, celle d’unir leurs forces, de rassembler leurs énergies pour poursuivre leurs rêves et surtout pour essayer de les concrétiser».
Evoquant le scénario, écrit sous le rythme d’un film, obéissant aux lois qui lui sont propres, le partenariat ainsi scellé incarne une étape décisive en perpétuelle marche. Bank of Africa s’implante ainsi indirectement au Maroc, ce qui fait dire à son président que «comme tout grand film, la beauté du décor, celui de votre merveilleux pays (le Maroc) vient magnifier et théâtraliser l’action de nos deux personnages, de leur histoire et du rythme de celle-ci ». Et de fait, une autre dimension africaine du Maroc se fait jour grâce l’association de BMCE Bank et de Bank of Africa.
REPÈRES
En chiffres et en date
> La Bank of Africa a été créée, il ya 25 ans.
> Elle couvre plusieurs pays et opère dans différents secteurs.
> Au 31 décembre, son bilan provisoire pesait 1,4 milliards d’euros et un bénéfice net final d’environ 18;3 millions d’euros.
Hassan Alaoui
LE MATIN