Les curieux seraient nombreux à passer aux guichets. Mais l’on ne sait si les détracteurs feront de même. On s’en souvient. Juste après la projection du film au Festival de Tanger et la polémique qui s’en est suivie, un député du PJD (Parti de la justice et du développement) avait interpellé le ministre de la Communication au sujet des scènes jugées « indécentes ». Mais quand on avait demandé à ce député s’il avait vu le film, il avait répondu « non ».
Inutile, donc, de s’attendre à ce que ceux qui estiment que le film est contraire à la morale, le voient avant de le juger à sa réelle valeur, écrit un journal de la place tout acquis à la cause de Leila Marrakchi.
« Marock », une histoire d’amour entre une musulmane et un juif, risque de diviser les Marocains plus qu’ils ne le sont déjà.
« Mais ce n’est qu’un argument pour que chaque clan étale au grand jour ses idéaux. Vous avez d’un côté ceux qui prônent la liberté d’expression et ceux qui, au nom de la morale et de l’éthique, veulent imposer à cette liberté des limites », nous a déclaré un sociologue qui a choisi de garder l’anonymat.
Manif contre « Marock » ?
Dans les médias, on est partagé. Deux exemples sont frappants. L’hebdomadaire « Tel Quel » a consacré son avant-dernier numéro au film. Le magazine a pris positon en faveur de « Marock ».
« Si Marock déclenche une telle passion, c’est qu’il nous colle le nez sur des réalités indiscutables. Et c’est pour ça qu’on l’aime ! », écrit Karim Boukhari, auteur d’un excellent dossier sur le film.
Le quotidien arabophone « Attajdid », proche du PJD et que certains considèrent comme porte-parole de ce dernier, a consacré dans son édition du mercredi 3 mai, un dossier de quatre pages au film. Où Leila Mararakchi est descendue en flamme.
Lors de l’émission « Polémiques », diffusée sur 2M, mercredi dernier, Hamid Berrada, journaliste à «Jeune Afrique», a posé la question suivante à Lahcen Daoudi, député et figure de proue du PJD : « Si le film « Marock » sort, est-ce que vous allez manifester contre ? »
La réponse de M. Daoudi, jugée évasive et hypocrite par Khalil Hachimi Idrissi, directeur d’Aujourd’hui Le Maroc, dans son Edito du lundi 8 mai, était la suivante : « Si les gens veulent manifester, ils sont libres de le faire. »
Comprenez qu’ils vont le faire, déduit un quotidien de la place.
Le film « Marock » est passé devant la commission de censure du CCM (Centre cinématographique marocain). La commission n’a coupé aucune scène du film. Elle l’a classé interdit au moins de 12 ans.
Dans une interview accordée à Menara, Leila Marakchi estime que le fait qu’aucune scène de son film n’a été censurée ne relève pas de la chance. « Parce que, nous dit-elle, mon film est un film marocain comme tous les films marocains. »
Mais il paraît, a écrit le journaliste et analyste Jamal Berraoui, il y a quelques mois : « certains s’estiment plus marocains que d’autres marocains. »
Menara.ma