Indignée, Fatna le scrutait sans dire un mot. Puis, le président de la Cour se tourna vers elle et lui donna la parole. A peine elle a commencé à relater son histoire qu’elle s’est fondue en larmes. «Ce qui m’est arrivée est répugnant», affirma-t-elle, le cœur serré d’amertume. Ce drame s’est produit la nuit. Elle couchait seule dans sa baraque. Personne ne vit avec elle. Son mari est décédé depuis une dizaine d’années et son unique enfant, marié, demeure loin de chez elle. Il lui rendait visite de temps en temps avec sa femme et ses enfants. Ce soir là, elle a entendu des coups à la porte. Sage-femme, Fatna a pensé que quelqu’un vient la chercher pour aider une voisine à accoucher. Elle est descendue de son lit.
A quelques pas, elle est arrivée au seuil de la porte. A peine elle a ouvert la porte qu’une personne l’a agrippée et l’a menacée: «Je suis un djinn, ne bouge pas et ne crie pas». C’était un jeune homme. Ensuite, ce dernier la poussa à l’intérieur de la maison. Fatna le suppliait de la relâcher : «Je suis une vieille femme, laisses-moi tranquille». Mais, en vain. Le prétendu djinn la menaçait de la rendre handicapée si elle continuait à le supplier. Il lui a enlevé son pantalon et l’a violée avant de prendre la poudre d’escampette. Aussitôt, elle a appelé les secours. Ses voisins sont sortis de chez eux avec des bâtons à la main pour la sauver. Le président a appelé l’un des trois témoins et lui a demandé s’il a vu Mohamed. «Non, je ne l’ai pas vu. Quand nous avons entendu les cris de Fatna, nous sommes sortis avec des bâtons à la main. Nous l’avons trouvée tomber par terre, sans pantalon, un peu plus loin de l’entrée de sa baraque. Nous n’avons pas trouvé son violeur», a affirmé le témoin. Les deux autres témoins ont confirmé les déclarations du premier. «Je ne sais pas si Mohamed l’a violée ou pas», a répondu chacun des trois témoins. Toutefois, l’un d’eux a précisé à la Cour que Mohamed est très connu pour son comportement cruel. Un deuxième témoin a expliqué à la Cour que Fatna s’est abstenue de lui livrer l’identité de son violeur en prétendant de ne pas l’avoir vu et l’a empêché d’alerter son fils. «Je ne voulais pas que mes voisins ainsi que mon fils soient emprisonnés à cause de moi, j’ai attendu l’arrivée des gendarmes pour leur annoncer l’identité du violeur», affirme Fatna. Pouvait-elle mentir et accuser sans raison valable un innocent dans une telle affaire délictuelle ? Les trois témoins ont attesté que Fatna est une brave femme, qui aidait gratuitement les femmes du douar à accoucher. «J’ai aidé même la mère de Mohamed pour le mettre au monde», a lancé Fatna en se fondant en larmes. Quelque temps plus tard, le verdict tomba : Mohamed est condamné à trois ans de prison.
source:aujourdhui